Santé | Maladies rares

Dans le cadre de la 13e journée des maladies rares, Strasbourg accueille un colloque scientifique, une conférence grand public et des animations autour des maladies rares. Parmi ces dernières, le lymphœdème primaire, une pathologie mal connue.

Par Geneviève DAUNE – 26 févr. 2020

Christine Ferrotti, responsable de l’association Mieux vivre son Lymphœdème pour l’Alsace-Lorraine, participera aux animations à la gare de Strasbourg ce samedi. Photo L’Alsace /Geneviève DAUNE

Le lymphœdème primaire est une maladie rare qui touche environ une personne sur 6000 selon le site Orphanet. C’est une anomalie du système lymphatique (voir encadré ci-contre), qui entraîne des gonflements de différentes parties du corps suite à l’accumulation de lymphe qui ne circule plus. Les zones les plus touchées sont les jambes et plus rarement des bras ou des organes génitaux. Les femmes sont plus touchées que les hommes, et la moitié des lymphœdèmes primaires apparaissent avant l’âge de 25 ans, à la naissance et à l’adolescence. Le 3e pic se situe vers cinquante ans. 95 % des cas sont dits sporadiques, c’est-à-dire que la maladie va affecter une personne sans aucun antécédent familial. Une forme génétique et héréditaire ne concerne que 5 % des cas.

Une maladie chronique et incurable

Christine Ferrotti est la responsable de l’antenne Alsace-Lorraine de l’Association Vivre mieux le lymphœdème (AVML). Un stand de l’association sera présent à la gare de Strasbourg (voir encadré).

« Le lymphœdème est une maladie chronique et incurable, explique-t-elle. Il existe deux types de lymphœdèmes, primaire et secondaire. Ce dernier survient suite à une opération chirurgicale ou à une chimiothérapie. »

Le plus connu est le « gros bras » ou lymphœdème du bras qui survient après un curage ganglionnaire suite à un cancer du sein. La filariose, maladie parasitaire, est aussi responsable de 120 millions de cas de lymphœdème secondaire dans les pays tropicaux et subtropicaux.

« Pour le lymphœdème secondaire, relève Christine Ferrotti, s’il n’y a pas d’antécédent de cancer, il y a beaucoup d’errance médicale car les médecins ne sont pas formés à reconnaître cette maladie qui relève de la spécialité de médecine vasculaire. Les centres nationaux de référence se situent à Montpellier et à Paris et il existe des centres de compétences dans les différents CHU. »

Trois stades dans la maladie

Le diagnostic est assez complexe et se base sur l’examen clinique.

« Il y a trois stades, reprend la responsable de l’AVML Alsace-Lorraine. Le stade 1, réversible, est le gonflement d’une jambe, d’une main ou d’un bras. On se couche le soir et le lendemain, il n’y a plus rien. »

Ces symptômes ne sont pas douloureux mais un signe doit alerter, celui du godet. Quand on appuie sur la zone enflée, le creux formé va persister après le retrait de l’appui.

Le stade 2 est caractérisé par le signe de Stemmer. « On ne peut pas pincer la peau. » À ce stade, l’épaississement de la peau rend l’œdème irréversible. « Le temps entre le stade 1 et le stade 2 est très variable. C’est pourquoi, dès l’apparition d’un œdème, il faut aller consulter ! » Le stade 3 est le plus grave avec une déformation importante de parties du corps, un épaississement et un durcissement de la peau, des papillomatoses cutanées (verrues multiples) et des épanchements de lymphe qui finissent par donner à la peau l’aspect de celle d’un éléphant (éléphantiasis).

Le lymphœdème peut se compliquer par une infection bactérienne (érysipèle), des mycoses dans les plis de la peau et entre les doigts et les orteils. À cela s’ajoutent des atteintes neurologiques, rhumatologiques, vasculaires ou articulaires.

Un impact moral et social

« Cette maladie impacte beaucoup la vie sociale et le moral des patients dont beaucoup font des dépressions », souligne la responsable associative. La prise en charge consiste à réduire le volume de l’œdème ou du moins à le contenir. « Cela nécessite que le patient se prenne en charge. La kinésithérapie est aussi indiquée pour faire du drainage lymphatique. « Les séances sont très mal remboursées, note Christine Ferrotti. Mais le patient peut apprendre l’autodrainage. » Il faut aussi avoir une bonne hygiène de vie, et éviter l’obésité qui aggrave le lymphœdème. Enfin, toute sa vie, il faut porter des vêtements et des bandages de compression, faire des soins de peau et pratiquer une gymnastique appropriée. « La différence entre deux pieds peut obliger à acheter deux paires de chaussures identiques mais de taille différente. Ceci augmente le reste à charge pour le patient, qui tourne en moyenne autour de 100 euros par mois ».

Une association active

L’AVML a été créée il y a vingt ans à la demande de patients et de professionnels de santé et fait partie de l’Alliance maladies rares. Elle compte aujourd’hui quelque 1400 membres et sept antennes réparties sur le territoire national. Huit associations partenaires mais indépendantes agissent aussi localement.

L’association a plusieurs objectifs : faire connaître la maladie, organiser des ateliers d’autobandage et d’autodrainage ; proposer de la gymnastique et du sport adapté ; permettre des échanges entre les patients, les orienter pour des consultations ; faire de l’éducation thérapeutique et apporter un soutien moral y compris auprès de parents d’enfants malades qui connaissent eux aussi l’errance médicale.

« Une fois par an, explique Christine Ferrotti, responsable de l’antenne Alsace-Lorraine, on organise une rencontre des enfants et adolescents pour des consultations pluridisciplinaires. »

L’association a aussi participé à l’étude Lymphorac menée au CHU de Montpellier sur le reste à charge pour les patients et les inégalités financières d’accès aux soins.

CONTACTER l’AVML Alsace Lorraine au 06.36.11.65.21 ou par courriel : avmlalsacelorraine@orange.fr.

Permanence : jeudi après-midi, semaine impaire de 13 h à 17 h, à la maison des usagers, située dans le hall de l’hôpital Émile-Muller, 20 avenue du Docteur-René-Laennec à Mulhouse.

Le système lymphatique

  • La lymphe baigne tous les organes du corps humain et a un volume de 2 à 3 litres. Elle a un rôle de drainage et d’épuration et prend notamment en charge les grosses protéines que les veines ne peuvent pas transporter. Mais elle nourrit aussi en apportant au sang les graisses absorbées au niveau de l’intestin grêle. C’est aussi par la lymphe que des cellules cancéreuses vont se déplacer et créer des métastases ailleurs dans le corps.
  • La lymphe a aussi un rôle de lutte contre les infections. Comme il existe un système sanguin, il existe un système lymphatique, formé d’un réseau de capillaires sous la peau qui vont rejoindre des canaux de plus en plus gros ou collecteurs munis de valves anti-retour à intervalle régulier. La lymphe des collecteurs est filtrée et épurée dans les ganglions, sous les aisselles, au niveau de l’aine et dans l’abdomen.
  • Il n’existe pas de pompe pour la lymphe , contrairement au sang qui circule grâce aux pulsations du cœur. Ce sont des portions de collecteurs qui, en se contractant, vont la faire circuler. Les contractions musculaires, les massages et la compression par des bandages ou des vêtements serrés stimulent cette circulation.